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Avis de la Fédération des cégeps sur le document de consultation Vers une accessibilité financière à la réussite de son projet d’études
Avis de la Fédération des cégeps
Sur le document de consultation
Vers une accessibilité financière à la réussite de son projet détudes
Déposé dans le cadre des travaux menés par le
Comité consultatif sur laccessibilité financière aux études
Recherche et rédaction
Véronique Raymond
Travaux de secrétariat
Suzanne Hamel
Révision linguistique
Christian Van Nuffel
Dépôt légal
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada
2e trimestre 2003
ISBN 2-89100-126-5
PA 45-03
Fédération des cégeps
500, boulevard Crémazie Est
Montréal (Québec)
H2P 1E7
Téléphone : 514-381-8631
Télécopieur : 514-381-2263
www.fedecegeps.qc.ca
Ce document a été préparé en collaboration avec un comité composé des personnes suivantes :
Claude Castonguay
Directeur des services aux étudiants et à la communauté
Collège de Sherbrooke
Francisca Côté
Coordonnateur aux affaires étudiantes
Collège dAlma
Jacques Gaudreault
Adjoint à la directrice, service aux étudiants
École nationale daérotechnique
Diane Lamothe
Conseillère à la vie étudiante
École nationale daérotechnique
Véronique Raymond
Conseillère en recherche et développement
Fédération des cégeps
Introduction
La condition socioéconomique des étudiants et des étudiantes est une préoccupation de longue date de la Fédération des cégeps et des 48 collèges quelle représente. Quelque 150 000 étudiants et étudiantes fréquentent les cégeps à lenseignement ordinaire chaque année à travers toutes les régions du Québec, et plus de 30 000 sont inscrits en formation continue.
Aussi, cest avec un vif intérêt que la Fédération a pris connaissance de la démarche amorcée par le Comité consultatif sur laccessibilité financière aux études dentreprendre une réflexion sur le Régime daide financière aux études du ministère de lÉducation du Québec, afin daméliorer laccès aux études et la réussite du projet détudes.
Lenquête de Ricard réalisée pour la Fédération des cégeps en 1997 a établi un lien entre la fréquence des difficultés économiques et plusieurs aspects liés à la réussite éducative : augmentation du taux dabandon de cours, du taux déchec, des difficultés scolaires et personnelles1. En 2001-2002, près dun étudiant du collégial sur quatre, soit 23,6 % des étudiants et des étudiantes, était bénéficiaire du Programme de prêts et bourses2. Selon les données 2002-2003 de lenquête annuelle « Aide-nous à te connaître », 8 % des étudiants interrogés se disent très préoccupés par leur situation matérielle et financière3. Ce pourcentage correspond à celui de létude de Ricard, selon laquelle 10 % des étudiants des cégeps vivent dans des conditions économiques précaires qui menacent la poursuite de leurs études4. Autre élément important, cette étude concluait également que « pour un grand nombre détudiants et détudiantes, le programme actuel de prêts et bourses ne règle pas leurs difficultés économiques5 ».
Cest pourquoi, dans cet avis, la Fédération des cégeps réitère limportance de maintenir le Régime daide financière aux études et souhaite porter à lattention du Comité les améliorations quelle juge nécessaire dy apporter afin dassurer laccessibilité financière aux études du plus grand nombre de jeunes et la réussite de leur projet détudes.
Considération générales
Le système daide financière aux études ne fonctionne pas en vase clos. La refonte de ce système doit se faire en lien avec de multiples paramètres qui dépassent le seul cadre du Régime mis en place par le ministère de lÉducation du Québec. La Fédération des cégeps croit que ce Régime doit aussi être arrimé à la politique des familles, afin de mettre en œuvre des actions ciblées qui favorisent la poursuite des études supérieures.
Le Régime devrait également sharmoniser avec les autres systèmes et programmes destinés aux personnes en situation précaire, notamment celui de lassistance emploi, afin dinciter les personnes bénéficiant de laide de dernier recours à reprendre leurs études et de faciliter la transition entre les deux programmes daide. Un meilleur arrimage devrait notamment permettre déviter que des bénéficiaires se retrouvent sans revenus en limitant les trop longues périodes dattente qui existent actuellement entre la fin des prestations de lassistance-emploi et la réception de laide financière aux études.
Le système daide financière aux études doit également évoluer de concert avec les établissements denseignement. Ce sont les responsables des services daide financière des établissements qui transigent quotidiennement avec les bénéficiaires du Régime daide financière aux études et qui interviennent auprès des étudiants et des étudiantes qui éprouvent des difficultés financières particulières. La Fédération estime que les établissements doivent pouvoir compter sur la marge de manœuvre et les sommes nécessaires pour pouvoir tenir compte des cas particuliers, y réagir rapidement et avec souplesse, afin déviter que les étudiants soient pénalisés.
De manière générale, les collèges constatent que la Direction générale de lAide financière aux études tend vers une plus grande décentralisation de la gestion de laide financière vers les établissements denseignement. La Fédération des cégeps avait soutenue cette avenue en 1995, lors de la consultation menée par le groupe de travail sur le Régime daide financière aux étudiants6, non sans préciser que les collèges doivent pouvoir bénéficier des conditions nécessaires à lexercice de leurs responsabilités. À titre dexemple, le projet CONTACT, qui permettra de verser laide financière directement au compte de létudiant, risque davoir comme effet pervers dentraîner la disparition des fonds de dépannage mis en place pour venir en aide à ceux qui vivent des difficultés financières particulières ou qui attendent le règlement de leur dossier. Ce mode de versement privera en effet les collèges de moyen de remboursement, compte tenu du fait que le gouvernement nentend pas garantir ces sommes.
Le principe dégalité daccès
Aujourdhui encore, lorigine sociale et économique est une variable déterminante dans le processus dentrée aux études postsecondaires7, les jeunes des milieux défavorisés accédant en nombre moins grand aux études supérieures. La Fédération des cégeps pense quil importe de travailler de façon ciblée en intervenant plus tôt auprès des jeunes du secondaire, en les informant mieux sur le Régime daide financière aux études afin de les inciter à entreprendre des études supérieures, indépendamment de leur situation financière ou de celle de leurs parents. Il faudrait également adapter les mesures daide financière de façon à ce quelles répondent aux besoins des clientèles plus défavorisées et quelles soient un incitatif à poursuivre des études supérieures.
Il importe également de maintenir les mesures favorisant laccessibilité financière et géographique à linstruction postsecondaire du plus grand nombre possible de jeunes sur lensemble du territoire québécois. Favoriser laccessibilité financière, cela devrait se traduire par une bonification du Régime actuel des prêts et bourses pour les étudiants qui y ont accès. Ainsi, il faudrait ajuster le niveau de certaines contributions prises en compte dans le calcul de laide financière accordée, cest-à-dire par exemple : réduire la contribution des personnes qui effectuent une réinsertion scolaire; éliminer la prise en considération des pensions alimentaires versées pour les enfants dans la déclaration de revenus des étudiants et de certains revenus dans la déclaration de revenus des parents, des conjoints et des répondants. Des mesures de bonification supplémentaires devraient également viser les clientèles cibles particulièrement démunies, telles que les jeunes familles et les familles monoparentales, la clientèle de laide de dernier recours ou les travailleurs à faibles revenus.
Finalement, dans la mesure où la condition personnelle influe aussi sur légalité daccès aux études supérieures, des mesures de soutien financier spécifiques devraient sappliquer à des catégories particulières détudiants. La Fédération des cégeps souhaite que soit reconnue à ce titre la catégorie détudiants présentant des troubles dapprentissage, au même titre que ceux présentant une déficience fonctionnelle majeure, compte tenu du fait que ces troubles constituent un frein à la poursuite des études et nécessitent un suivi particulier de la part de différents intervenants et une aide financière appropriée. Dans le même ordre didées, elle estime que la déficience fonctionnelle majeure devrait être définie en fonction de la difficulté dapprentissage plutôt que du handicap physique, et que les paramètres de laide financière devraient être ajustés en conséquence.
Les droits de scolarité
La Fédération des cégeps abonde dans le même sens que le ministère de lÉducation en ce qui a trait à la constitution dun Régime daide financière basé sur le principe compensatoire selon lequel laide est ciblée et orientée pour lever les barrières économiques à laccessibilité aux études, et souhaite que ce principe soit maintenu.
Le document de consultation souligne par ailleurs que les problématiques actuelles de financement de lenseignement supérieur et le contexte de réduction des dépenses publiques remettent en question léquilibre entre le rôle de lÉtat et linvestissement financier collectif dans lenseignement supérieur, la contribution de létudiant et le soutien financier accordé par le système daide mis en place, et soulèvent la question des droits de scolarité. Il note également que le débat autour des droits de scolarité réfère à des enjeux tant financiers que sociaux, politiques et éducatifs8. Cest pourquoi la Fédération des cégeps estime que si la question des droits de scolarité devait être examinée, elle devrait faire lobjet dun débat public réunissant les principaux acteurs de la société et des milieux déducation.
Les étudiants à temps partiel
La Fédération des cégeps a appuyé linitiative du ministère de mettre en place en 2002, le nouveau Programme de prêts destinés aux étudiants à temps partiel. Ce dernier favorise un accès plus égalitaire à un soutien financier aux études. Une iniquité subsiste toutefois dans le Programme actuel pour les étudiants qui passent des études à temps plein aux études à temps partiel et qui doivent commencer à rembourser leur dette, ce qui peut constituer un frein à la poursuite des études et aller à lencontre des objectifs mêmes du Programme. Aussi, la Fédération croit que le Programme de prêts pour les étudiants à temps partiel devrait être amélioré et permettre aux étudiants à temps plein qui désirent poursuivre leurs études à temps partiel de continuer à bénéficier du régime daide financière aux études, sans avoir à prendre en charge leur prêt.
La Fédération tient également à réitérer la nécessité de mieux arrimer le Programme dassistance-emploi à celui de lAide financière, notamment au Programme de prêts pour les études à temps partiel pour les personnes bénéficiant de laide de dernier recours effectuant un retour aux études qui sinscrivent à trois cours par session. La Fédération a soulevé cette problématique à plusieurs reprises lors de consultations précédentes9. Actuellement, ces étudiants ne sont pas couverts par le Programme de prêts pour les études à temps partiel, et ils ne reçoivent pas non plus daide de dernier recours puisquils poursuivent des études. La définition des études à temps partiel devrait conséquemment être harmonisée entre le Programme dassistance-emploi et celui de lAide financière aux études de sorte quils puissent bénéficier de lun ou lautre de ces régimes.
Laide compensatoire accordée aux étudiants à temps plein dans le Programme de prêts et bourses
La contribution individuelle
Les difficultés économiques auxquelles ils ont à faire face obligent plusieurs étudiants à recourir à un travail salarié durant leurs études afin de subvenir à leurs besoins. Les données 2002-2003 de lenquête annuelle « Aide-nous à te connaître » révèlent que le phénomène du travail pendant les études touche six répondants sur dix10. Si le travail salarié durant les études recèle des aspects positifs, notamment le développement de lautonomie et lacquisition dexpérience de travail, au-delà de quinze heures par semaine, il augmente également les risques dabandon et comporte des effets négatifs sur la réussite dun projet détudes. Il en va autrement du travail dété qui permet à létudiant de subvenir à ses besoins pendant lannée scolaire, sans poser de problèmes de conciliation avec les études. En 1998, 72 % des étudiants du collégial avaient travaillé durant la période estivale précédant lenquête réalisée par Ricard11.
Conséquemment, afin de favoriser la persévérance et la réussite scolaire, la Fédération des cégeps croit que des mesures doivent être mises en place pour encourager les étudiants à travailler lété et pour éviter quils consacrent plus de quinze heures par semaine à un travail salarié pendant leurs études. Elle considère que le Programme de prêts et bourses doit être un incitatif en ce sens. Actuellement, le calcul de la contribution minimale de létudiant au financement de ses études dans le Régime des prêts et bourses défavorise létudiant qui travaille durant lété ou qui, après une interruption de scolarisation, retourne aux études. Certains étudiant font donc délibérément le choix de ne pas occuper demploi rémunéré pendant la période où ils ne sont pas aux études, afin de ne pas affecter le calcul de laide financière qui leur sera accordée. Cest pourquoi la Fédération recommande que le mode de calcul de laide financière accordée soit révisé de façon à éviter de pénaliser financièrement les étudiants qui choisissent de travailler durant la période estivale, soit par une augmentation du seuil de revenu minimum des dépenses admissibles, par la mise en place dune table dégressive de prise en compte des revenus, ou encore par une diminution du taux de prise en compte des revenus.
Également, comme nous lavons mentionné, le mode de calcul actuel de la contribution individuelle pénalise lourdement les personnes qui effectuent un retour aux études après une interruption de scolarisation en limitant leur accès à une bourse et en diminuant le montant du prêt qui leur est consenti. Les transformations du marché du travail font en sorte quun nombre grandissant détudiants et détudiantes effectuent un retour aux études afin daccroître et de perfectionner leurs compétences ou deffectuer une réorientation de carrière. Souvent plus âgés que la moyenne des étudiants, ils ont acquis un mode de vie lié à un revenu de travail et ils doivent souvent assumer des responsabilités familiales12.
Dans un tel contexte, la Fédération renouvelle sa demande à leffet que les bases de calcul de laide financière accordée soient modifiées pour ne tenir compte que des périodes où létudiant est aux études de façon à éviter de pénaliser les personnes qui reviennent au collégial ou à luniversité après avoir été sur le marché du travail. Ainsi, comme le recommandait la Fédération en 1998, « il faudrait calculer le montant de la contribution des personnes qui effectuent un retour aux études les étudiants et les étudiantes avec statut dautonome à partir de la date du début des cours et non à partir de la date du 1er janvier de lannée dattribution, et calculer les dépenses admises suivant le même principe13 » .
La contribution parentale ou du conjoint
Létude de Ricard réalisée en 1998 a permis de dégager plusieurs constats qui guident la réflexion de la Fédération des cégeps dans ses recommandations concernant la contribution parentale ou du conjoint. Létude pose que « le niveau dautonomie financière réelle des étudiants et des étudiantes et le degré de contribution parentale au financement de leurs études varient en fonction de leur âge »14. Donc, plus un étudiant est âgé, moins il bénéficie dun soutien financier parental. Par ailleurs, on observe une relation entre le degré dautonomie financière et le mode de résidence des étudiants, ces derniers étant plus autonomes financièrement lorsquils ne résident plus chez leurs parents. « À 22 ans, plus de 75 % des étudiants nhabitent plus chez leurs parents durant lannée scolaire et 38 % ne reçoivent plus de contribution financière parentale15 ». Létude fait également ressortir que plus un étudiant est autonome financièrement, plus il affirme connaître des difficultés économiques.
Cest pourquoi la Fédération propose que les critères de dépendance soient abolis pour les étudiants qui ne résident pas chez leurs parents parce quils sont inscrits à un programme unique dans une autre région. Et que les critères de dépendance soient décroissants avec lâge, jusquà accorder à tous les étudiants le statut dautonome sans contribution parentale ou du répondant à partir de lâge de 22 ans.
Dans un autre ordre didées, la Fédération souhaite que la prise en compte de la contribution financière des parents dans le calcul de laide accordée soit assouplie de façon à tenir compte du fait que cette contribution nest pas toujours versée à létudiant, ce qui a pour conséquence daccentuer ses difficultés économiques.
Par ailleurs, les bénéficiaires dont les parents ou le répondant ne contribuent pas financièrement aux études ne disposent que de peu de moyens pour faire valoir leurs droits, outre la possibilité de recourir aux tribunaux, une solution lourde de conséquences sur les liens familiaux et dont plusieurs refusent de se prévaloir. La Fédération des cégeps considère à cet égard que les recours possibles dont bénéficie un étudiant pour faire valoir la non-contribution de ses parents ou de son répondant doivent être étendus et que des mesures de remplacement doivent être instaurées afin de limiter la « judiciarisation » des relations parents-enfants.
Finalement, le seuil de revenu à partir duquel une contribution est exigée des parents étant fixé à 21 885 $ avant impôt lorsque les parents vivent ensemble, soit le plus bas au Canada16, la Fédération juge quil impose de lourdes contraintes financières pour les personnes à revenu modique. Elle recommande que le seuil du revenu à partir duquel une contribution est exigée des parents ou du conjoint soit augmenté, sans toutefois modifier sa courbe de progression.
Les dépenses admises
À maintes reprises, le réseau des collèges a souligné linadéquation du niveau des dépenses admises pour les frais liés à lachat de livres et de matériel scolaire dans le Programme de prêts et bourses, normalisé depuis plusieurs années sans avoir fait lobjet dune indexation et qui apparaît clairement en dessous des dépenses réelles. Les données tirées de quelques études citées dans le document de consultation abondent dans le même sens : alors que laide financière aux études octroie de 125 $ à 150 $ par trimestre pour lachat de livres et de matériel scolaires à un étudiant du collégial selon quil étudie au secteur préuniversitaire ou technique, létude de Ricard, par exemple, avance des chiffres de lordre de 242 $ en moyenne par trimestre17. Cette étude a notamment fait ressortir « que 18 % des personnes interrogées ont souvent ou très souvent manqué dargent pour lachat dun bien ou dun service essentiel (nourriture, vêtement, logement) et que, parmi elles, celles qui bénéficient du programme de prêts et bourses sont généralement plus nombreuses dans cette
situation »18.
La Fédération des cégeps juge quil est urgent que soit réévalué à la hausse le niveau des dépenses admises pour les frais scolaires selon le programme détudes et que les paramètres de calcul de laide financière accordée soient ajustés en conséquence. Nous pensons que le niveau de dépenses admises devrait minimalement être doublé. Il nous apparaît également que les dépenses servant à établir les barèmes des frais de subsistance doivent être réévaluées à la hausse, et que les paramètres de calcul de laide financière accordée doivent être ajustés en conséquence et indexés annuellement au coût de la vie.
Les périodes dadmissibilité
La Fédération est en accord avec les objectifs poursuivis par le ministère dans le calcul des périodes dadmissibilité à laide financière aux études, soit de réduire la durée des études et de limiter lendettement. Cependant, le ministère ne peut faire abstraction dun des aspects essentiels du rôle des cégeps, dont le Conseil supérieur de léducation a dailleurs souligné limportance, soit celui daccompagner les étudiants et les étudiantes dans leur démarche dorientation.
Les statistiques sur « lindécision vocationnelle » des jeunes qui composent la population étudiante collégiale font état du fait quenviron 30 % dentre eux sont hésitants sur leur choix de carrière, et que 20 % seulement de ceux qui étudient au secteur préuniversitaire ont un projet scolaire bien établi19. Cette indécision se traduit notamment par des changements de programme : 30 % des étudiantes et des étudiants dans les cohortes des nouveaux inscrits au collégial effectueront au moins un changement de programme20.
Compte tenu de ce qui précède, la Fédération considère que les étudiants, après avoir effectué un premier changement de programme, devraient pouvoir bénéficier à nouveau de la période maximale dadmissibilité aux prêts et bourses pour chaque niveau détudes, sans compter les trimestres pour lesquels une aide leur a déjà été attribuée, comme lors dune première inscription à un programme.
La Fédération des cégeps suggère également que la comptabilisation du nombre de trimestres inclus dans la période maximale dadmissibilité aux prêts et bourses pour le niveau détudes collégiales fasse abstraction de la session daccueil et dintégration. Selon le Conseil supérieur de léducation, elle représente une mesure explicitement liée au soutien à lorientation des élèves. Depuis sa mise en place, en 1993, jusquen 2000, « de 7 % à 10 % de ceux qui ont entrepris des études collégiales lont fait en sinscrivant dabord à une session daccueil et dintégration »21. À lautomne 2002, quelque 5000 étudiants et étudiantes y étaient inscrits22.
Les trajectoires de formation des étudiants du collégial se diversifient et se complexifient. Elles sont souvent marquées par des besoins de réorientation et entrecoupées par des expériences dintégration au marché du travail. La hausse des exigences sur le marché du travail nécessite un apprentissage continuel tout au long de la vie professionnelle qui pousse les uns à compléter leur formation ou, les autres, à se réorienter professionnellement. Cest pourquoi la Fédération estime que les étudiants qui souhaiteraient obtenir un deuxième diplôme au même ordre denseignement devraient pouvoir bénéficier à nouveau dun soutien financier du Programme de prêts et bourses suivant la période maximale dadmissibilité pour chaque niveau détudes, notamment dans les programmes où il y a pénurie de main-dœuvre.
Le Programme de remise de dette
Comme le souligne le Comité consultatif, les paramètres du Programme de remise de dette limitent laccessibilité aux étudiants « qui ont obtenu un diplôme dans les délais prévus et qui ont, chaque année, reçu une bourse dans le cadre du programme de prêts et bourses23 » . Le nombre de boursiers ayant tendance à diminuer depuis 1996-1997, il est manifeste que le Programme vise une clientèle de plus en plus restreinte. En 2001-2002, moins de 1300 personnes en ont été bénéficiaires24 ».
La Fédération est davis que dans un souci déquité et de cohérence, et dans la mesure où le Programme de remise de dette vise à récompenser la diplomation dans les temps requis par une réduction de lendettement, le programme doit toucher lensemble des étudiants qui ont obtenu un diplôme dans les délais prévus et qui ont reçu un prêt dans le cadre du Programme de prêts et bourses. Laccessibilité au Programme devrait également être étendue à tous les ordres denseignement.
Par ailleurs, afin de constituer un incitatif important à la diplomation selon la durée prévue, et de contribuer à diminuer de manière significative lendettement des étudiants à la fin de leurs études, la Fédération suggère que le pourcentage de remise de dette soit rétabli à 25 % plutôt que 15 %. Le Programme gagnerait également à être davantage publicisé afin dencourager les étudiants à y participer. Finalement, le Programme devrait prendre en compte le prolongement des études dû à des circonstances exceptionnelles, comme une maladie nécessitant une hospitalisation ou encore un accouchement.
Le Programme de remboursement différé
En 2001-2002, lendettement moyen dun étudiant ayant obtenu son diplôme détudes collégiales était de 3774 $ au préuniversitaire et de 6344 $ au secteur technique25. Au moment de la prise en charge de leur dette détudes, en 1997, 17 % des ex-étudiants ayant obtenu un diplôme détudes collégiales ont rapporté éprouver des difficultés de remboursement26 et les défauts de paiement atteignaient 7 %27. En raison des problématiques liées à linsertion socioprofessionnelle et à la précarisation des emplois, ces difficultés se posent de façon prépondérante au cours des premières années de remboursement.
À la lumière de ces données, la Fédération des cégeps suggère que le Programme de remboursement différé soit bonifié afin den étendre laccessibilité et de mieux soutenir les ex-étudiants qui vivent une situation financière précaire et qui éprouvent des difficultés de remboursement de leur dette détudes. Nous pensons quil faudrait majorer la durée maximale daccessibilité au Programme de quatre à six périodes de six mois, au cours des cinq premières années de la prise en charge du prêt par lex-étudiant. Il faudrait également augmenter le seuil de revenus mensuels en deçà duquel un individu peut y avoir accès.
Le mode de remboursement
La Fédération accueille avec ouverture les questionnements portant sur linstauration dun mode de remboursement proportionnel au revenu. Elle y voit une recherche de solution novatrice mieux adaptée aux problèmes financiers que peuvent rencontrer les ex-étudiants au moment de prendre en charge le remboursement de leur prêt. Elle souhaiterait toutefois que des études plus approfondies soient réalisées sur ce mode de remboursement afin den mesurer tous les effets, dévaluer la pertinence de le mettre en place et den déterminer les paramètres le cas échéant.
Conclusion
La Fédération des cégeps se réjouit de linitiative du Comité consultatif sur laccessibilité financière aux études dentreprendre une réflexion sur le système dAide financière aux études. Le Québec sest doté, avec le rapport Parent, dun idéal de démocratisation de léducation pour tous ceux qui ont les capacités et la volonté de poursuivre des études supérieures. Parallèlement, il a mis en place un système daide financière aux études ayant pour objectif de réduire les obstacles économiques à laccessibilité aux études par loctroi dun soutien financier adéquat qui assure aux jeunes les conditions nécessaires pour mener à bien leur projet détudes. La Fédération des cégeps croit fermement en ces principes, qui prennent dautant plus dimportance dans une économie du savoir où la hausse des exigences de qualification des travailleurs, et les nouveaux besoins du marché du travail, font des études supérieures la pierre angulaire dune insertion socioprofessionnelle réussie et de linclusion sociale et politique.
Aussi, la Fédération souhaite que les recommandations quelle porte à lattention du Comité soient entendues et prises en compte par le ministère, et que les correctifs nécessaires soient apportés au Régime actuel daide financière aux études afin quil favorise véritablement non seulement laccessibilité, mais également la réussite du projet détudes.
Synthèse des recommandations
Considérations générales
- Que le système daide financière aux études soit mieux arrimé à la politique des familles.
- Que le système daide financière aux études sharmonise de manière cohérente avec les autres systèmes et programmes destinés aux personnes en situation précaire, notamment celui de lassistance-emploi, afin dinciter le retour aux études des personnes bénéficiant de laide de dernier recours et de faciliter la transition entre les deux programmes daide.
- Que les établissements denseignement aient la marge de manœuvre et les sommes nécessaires pour pouvoir tenir compte des cas particuliers.
- Que compte tenu dune plus grande décentralisation de la gestion de laide financière du ministère vers les établissements denseignement, les collèges puissent bénéficier des conditions nécessaires à lexercice de leurs responsabilités.
Le principe dégalité daccès
- Que légalité daccès à lenseignement postsecondaire des jeunes de milieux défavorisés soit davantage favorisée :
- Que des interventions ciblées soient faites auprès des jeunes du secondaire afin de les inciter à entreprendre des études supérieures, indépendamment de leur situation financière ou de celle de leurs parents, en les informant mieux sur le Régime daide financière aux études.
- Notamment, que les mesures daide financière soient adaptées de façon à répondre aux besoins de cette clientèle et quelles constituent un incitatif à la poursuite des études supérieures.
- Que soit ajusté le niveau de certaines contributions prises en compte dans le calcul de laide financière accordée, cest-à-dire par exemple : que la contribution des personnes qui effectuent une réinsertion scolaire soit réduite; que soit éliminée la prise en considération des pensions alimentaires versées pour les enfants dans la déclaration de revenus des étudiants et de certains revenus dans la déclaration de revenus des parents, des conjoints et des répondants.
- Que des mesures de bonification supplémentaires visent les clientèles cibles particulièrement démunies, telles que les jeunes familles et les familles monoparentales, la clientèle de laide de dernier recours ou les travailleurs à faibles revenus.
- Que la catégorie détudiants présentant des troubles dapprentissage soit reconnue à ce titre.
- Que la déficience fonctionnelle majeure reconnue à ce titre soit définie en fonction de la difficulté dapprentissage plutôt que du handicap physique.
Les droits de scolarité
- Que le principe compensatoire selon lequel laide est davantage ciblée et orientée pour lever les barrières économiques à laccessibilité aux études soit maintenu.
- Que, si la question des droits de scolarité devait être examinée, elle fasse lobjet dun débat public avec les principaux acteurs de la société et des milieux déducation.
Les étudiants à temps partiel
- Que le programme de prêts pour les étudiants à temps partiel soit amélioré pour permettre aux étudiants à temps plein qui désirent poursuivre leurs études à temps partiel de continuer à bénéficier du régime daide financière aux études sans avoir à commencer le remboursement de leur dette.
- Que la définition du temps partiel aux études soit harmonisée entre le Programme dassistance-emploi et celui de lAide financière aux études pour les personnes bénéficiant de laide de dernier recours effectuant un retour aux études à raison dune inscription à trois cours par session, de sorte quils puissent bénéficier de lun ou lautre de ces régimes.
Laide compensatoire accordée aux étudiants à temps plein dans le Programme de prêts et bourses
La contribution individuelle
- Que les bases de calcul de laide financière accordée soient modifiées pour ne tenir compte que des périodes où létudiant est aux études de façon à éviter de pénaliser les personnes qui effectuent un retour aux études après avoir été sur le marché du travail.
- Que le mode de calcul de laide financière accordée soit révisé de façon à éviter de pénaliser financièrement les étudiants qui choisissent de travailler durant la période estivale :
- Que le seuil de revenu minimum des dépenses admissibles soit augmenté.
- Quune table dégressive de prise en compte des revenus soit mise en place ou que le taux de prise en compte des revenus soit abaissé.
La contribution parentale ou du conjoint
- Que le seuil du revenu à partir duquel une contribution est exigée des parents ou du conjoint soit augmenté, sans toutefois modifier sa courbe de progression.
- Que la prise en compte de la contribution parentale dans le calcul de laide soit assouplie de façon à aider les bénéficiaires dont les parents ou le répondant ne contribuent pas financièrement aux études de leur dépendant :
- Que les critères de dépendance soient abolis pour les étudiants non-résidents dans le cas des programmes uniques.
- Que les critères de dépendance soient décroissants avec lâge jusquà accorder à tous les étudiants le statut dautonome sans contribution parentale ou du répondant à partir de lâge de 22 ans.
- Que les recours possibles permettant à un étudiant de faire valoir la non-contribution de ses parents ou de son répondant soient étendus afin de limiter la « judiciarisation » des relations parents-enfants.
Les dépenses admises
- Que soient réévaluées à la hausse les dépenses admises pour les frais scolaires selon le programme détudes et que les paramètres de calcul de laide financière accordée soient ajustés en conséquence. Le niveau de dépenses admises devrait minimalement être doublé.
- Que soit réévalué à la hausse lensemble des dépenses servant à établir les barèmes des frais de subsistance, que les paramètres de calcul de laide financière accordée soient ajustés en conséquence et quils soient indexés annuellement au coût de la vie.
Les périodes dadmissibilité
- Que la comptabilisation du nombre de trimestres inclus dans la période maximale dadmissibilité aux prêts et bourses pour le niveau détudes collégiales fasse abstraction de la session daccueil et dintégration.
- Que les étudiants, après avoir effectué un premier changement de programme, puissent à nouveau bénéficier de la période maximale dadmissibilité aux prêts et bourses pour chaque niveau détudes, sans compter les trimestres pour lesquels une aide a déjà été attribuée, comme lors dune première inscription à un programme.
- Que les étudiants qui souhaiteraient obtenir un deuxième diplôme au même ordre denseignement puissent bénéficier à nouveau dun soutien financier du Programme de prêts et bourses suivant la période maximale dadmissibilité pour chaque niveau détudes, notamment dans les programmes où il y a pénurie de main-dœuvre.
Le Programme de remise de dette
- Que le Programme de remise de dette touche lensemble des étudiants qui ont obtenu un diplôme dans les délais prévus et qui ont reçu un prêt dans le cadre du Programme de prêts et bourses et ce, à tous les ordres denseignement.
- Que le pourcentage de remise de dette soit rétabli à 25 % plutôt que 15 % afin dinciter les étudiants à terminer leurs études dans les délais prévus et de contribuer à diminuer de manière significative lendettement des étudiants à la fin de leurs études.
- Que le programme soit davantage publicisé afin dencourager les étudiants à y participer.
- Que le programme, tout en incitant les étudiants à terminer leurs études dans les délais prévus, tienne compte du prolongement des études dû à des circonstances exceptionnelles, comme une maladie nécessitant une hospitalisation ou encore un accouchement.
Le Programme de remboursement différé
- Que la durée maximale daccessibilité au Programme de remboursement différé passe de quatre à six périodes de six mois, au cours des cinq premières années de prise en charge du prêt par lex-étudiant.
- Que le seuil de revenus mensuels en deçà duquel un individu peut avoir accès au Programme de remboursement différé soit augmenté afin de mieux soutenir les ex-étudiants qui vivent une situation financière précaire au moment de prise en charge de leur prêt.
Le mode de remboursement
- Que des études plus approfondies soient réalisées sur le mode de remboursement proportionnel au revenu (RPR) afin den mesurer tous les effets, dévaluer la pertinence de le mettre en place et den déterminer les paramètres le cas échéant.
1 FÉDÉRATION DES CÉGEPS, La condition économique des étudiants et des étudiantes de collège : problématique et recommandations relatives à lamélioration du programme daide financière aux études, Montréal, 1998, p. 9.
2 MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION DU QUÉBEC, Aide financière aux études, Statistiques, Rapport 2001-2002.
3 SERVICE RÉGIONAL DADMISSION DE MONTRÉAL, Données réseau 2002-2003 de lenquête « Aide-nous à te connaître », Montréal, SRAM, 2002.
4 RICARD, Philippe, Les conditions socio-économiques des étudiants et des étudiantes des cégeps du Québec, Montréal, Collège de Rosemont en collaboration avec la Commission des affaires étudiantes de la Fédération des cégeps, 1998, p. 88.
5 FÉDÉRATION DES CÉGEPS, op. cit., 1998, p. 8.
6 FÉDÉRATION DES CÉGEPS, Mémoire de la Fédération des cégeps sur le Régime daide financière aux étudiants / Présenté au groupe de travail sur le Régime daide financière aux étudiants, Montréal, 1995, p. 13-15.
7 SALES, A. et al. Le monde étudiant à la fin du XXe siècle. Rapport final sur les conditions de vie des étudiants universitaires dans les années quatre-vingt-dix, Montréal, Université de Montréal, 1996, p. 57-58.
8 COMITÉ CONSULTATIF SUR LACCESSIBILITÉ FINANCIÈRE AUX ÉTUDES, Vers une accessibilité financière à la réussite de son projet détudes. Document de consultation. Québec, 2003, p. 12-17.
9 FÉDÉRATION DES CÉGEPS, Mémoire de la Fédération des cégeps sur le projet de loi no 112 Loi visant à lutter contre la pauvreté et lexclusion sociale et sur lénoncé de politique La volonté dagir, la force de réussir / Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et lexclusion sociale, Montréal, 2002, 19 p.
FÉDÉRATION DES CÉGEPS, op. cit., 1998, 31 p.
FÉDÉRATION DES CÉGEPS, op. cit., 1995, 25 p.
10 SRAM, op. cit., 2002.
11 RICARD, op cit., 1998, p. 60.
12 FÉDÉRATION DES CÉGEPS, op. cit., 1998, p. 11 et 12.
13 FÉDÉRATION DES CÉGEPS, op. cit., 1998, p. 19.
14 FÉDÉRATION DES CÉGEPS, op. cit., 1998, p. 7.
15 Ibid.
16 COMITÉ CONSULTATIF SUR LACCESSIBILITÉ FINANCIÈRE AUX ÉTUDES, op. cit., Québec, 2003, p. 47.
17 COMITÉ CONSULTATIF SUR LACCESSIBILITÉ FINANCIÈRE AUX ÉTUDES, op. cit., Québec, 2003, p. 58 et 59.
18 FÉDÉRATION DES CÉGEPS, op. cit., 1998, p. 28.
19 FÉDÉRATION DES CÉGEPS, Le cégep, une force davenir pour le Québec. Plan de développement du réseau collégial public, Montréal, 2003, p. 50.
20 CONSEIL SUPÉRIEUR DE LÉDUCATION, Au collégial, lorientation au cœur de la réussite, Québec, 2002, p. 126.
21 CONSEIL SUPÉRIEUR DE LÉDUCATION, ibid., p. 53.
22 FÉDÉRATION DES CÉGEPS, op. cit., 2003.
23 COMITÉ CONSULTATIF SUR LACCESSIBILITÉ FINANCIÈRE AUX ÉTUDES, op. cit., Québec, 2003, p. 67 et 68.
24 MINISTÈRE DE LÉDUCATION DU QUÉBEC, op. cit., 2001-2002, p. 54.
25 MINISTÈRE DE LÉDUCATION DU QUÉBEC, op. cit., Rapport 2001-2002, p. 32.
26 STATISTIQUE CANADA, « Le remboursement des prêts étudiants », Perspective, 1999.
27 COMITÉ CONSULTATIF SUR LACCESSIBILITÉ FINANCIÈRE AUX ÉTUDES, op. cit., Québec, 2003, p. 76.